S'asseoir tous deux au bord d'un flot qui passe,
Le voir passer;
Tous deux, s'il glisse un nuage en l'espace,
Le voir glisser;
A l'horizon, s'il fume un toit de chaume,
Le voir fumer;
Aux alentours, si quelque fleur embaume,
S'en embaumer;
[Si quelque fruit, où les abeilles goûtent,
Tente, y goûter;
Si quelque oiseau, dans les bois qui l'écoutent,
Chante, écouter...]
Entendre au pied du saule où l'eau murmure
L'eau murmurer;
Ne pas sentir, tant que ce rêve dure,
Le temps durer;
Mais n'apportant de passion profonde
Qu'à s'adorer;
Sans nul souci des querelles du monde,
Les ignorer;
Et seuls, heureux devant tout ce qui lasse,
Sans se lasser,
Sentir l'amour, devant tout ce qui passe,
Ne point passer!
Poesía de Sully Prudhomme (Les vaines tendresses, 1875), puesta en música por Gabriel Fauré (Op. 8, nº 1, 1875) y cantada por Ninon Vallin.